Une vie par procuration?
Alors la vie s'organise souvent en "sessions". Moi, quand j'écoute de la musique, ça fonctionne par périodes. Enfin ça fait ça pour beaucoup de gens en même temps. Par exemple, je sors d'une période arennnebi-Sean Paul, et en novembre, je me suis mis du David Bowie sous perfusion. C'est donc solennellement que j'inaugure une des nouvelles tonalités de ce blogue : la session questionnement réalité/ficton. Je veux faire un gros truc, because c'est un sujet qui me tient à coeur, et que plusieurs commentaires à ce sujet m'ont laissée perplexe. Genre "C'est mal de rêver sa vie". Moi, je ne pense pas. Et surtout, ze koueshtionne baïe Nitouche : "la fiction nous fait-elle plutôt plus de bien, ou plutôt plus de mal ?"
Alors comme c'est un sujet qui me tient à coeur pour plusieurs raisons, on va essayer de s'atteler, modestement, à la tâche. Pourquoi faire chier le monde avec ce genre de question à la con, ici? Parce que c'est aussi la condition de vie d'un blogue qui est en jeu (comme j'y vais!!)
Oui : en discutant hier avec l'amie Nyfah (avec accessoirement 5 CRS dans le nez, mais je disais quand même des choses censées), je réfléchissais à ce que je laissais transparaître de wam sur ces lignes. Que le fait d'écrire sur un blogue soit fondamentalement narcissique, c'est déjà dit, et je le maintiens. Mais écrire un beblogue, c'est aussi essayer de se réinventer un peu, de donner de la linéarité à des événements ou à une vie qui pourtant est tout sauf linéaire. Avant de partir dans des sphères que je ne comprends pas, je prie pour que Nyfah laisse un commentaire où elle expliquera mieux que moi le coup de la différence fiction/récit, et le problème de la linéarité. Déjà, on se fictionnalise dans la mesure où on essaie de trouver une façon de raconter, avec souvent un enchaînement causal. A cela s'ajoute la dimension création de personnage. Non, je ne dis pas par là qu'en fait je m'appelle Roger, que j'ai 48 ans, que je travaille depuis 17 ans à Pont-à-Mousson à fabriquer des bouches d'égoût en fonte, que je me suis inventé 4 vies de 4 demoiselles goutues et jolies et intellectuellement de type étudiantes à vie. Non, certes. Mais au-delà de ça, on enjolive notre wam quand on s'écrit, en quelque sorte. Ou pas d'ailleurs.
Par exemple, aujourd'hui, j'ai envie de dire que je me suis pas lavée. Mes cheveux son dégueu, effet bar enfumé de la veille au soir (et vous remarquerez que c'est la deuxième fois que je mentionne le fait d'avoir bu des coups hier, dans le genre "Mais voui ma bonne dame ma vie est incroyable, je sors et je picole"). Je porte le même jean depuis une semaine. Je suis pas maquillée, les dents pas lavées, je me nourris de kébab et de McDalle depuis 24 heures, mon système pileux est développé de SMLP. Bon, je viens de détruire une image glamour en deux secondes, mais je ne dis que des choses vraies.
Tout ça pour dire : ce qu'on dit sur ces pages, c'est nous, mais de manière biaisée, tuwah, lecteur? On a un éthos à peu près aussi fluctuant que nos surnoms nazes, en quelque sorte. Le B15, c'était un appart' qu'on a partagé, mais il y a bientôt 4 ans maintenant. Je le recrée de manière un peu virtuelle, mais c'est de l'ordre de la pure création. Je pousserai pas jusqu'à dire artistique certes, mais c'est de la construction, de ces constructions qui matérialisent des choses qui ne sont pas nécessairement des en-soi. Tout ça donc pour dire que la question de Nitouche a BEAUCOUP d'implications, depuis les frivolités qu'on écrit sur le PC, jusqu'à l'image qu'on livre de nous ici, qui est forcément fluctuante, même que c'est pas toujours facile à gérer, j'en conviens, en passant par des parties plus intimes de nous (mon "côté obscur" par exemple). L'idée générale, c'est que la fiction s'oppose à la réalité, qu'elle nous empêche de vivre pleinement ou qu'on vit par "procuration" (on remarque que je persiste à assumer mes affections passées pour JJG). Je pense très sincèrement que les choses ne sont pas si binaires, mais surtout qu'elles ne sont pas si graves.
J'espère que vous répondrez présent les gens, et que je vais pas vous faire fuir...
PS : il y a des moments où ma mère me sidère. Elle prend un pull à moi en me disant qu'elle trouve qu'il est joli, comme marron. Moi je lui répond qu'il est certes beige, mais rosé, quand même. Sa réponse : "Ca fait plus chataigne clair que rosé quand même..." Hallucinant je trouve...